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L’étoile du matin

C’est l’appel du village aux paresseux bergers
Qui chante ce matin dans mon cœur, et j’aspire,
Tous les verres vidés, à dormir aux vergers
Où chantent les oiseaux, où les abeilles girent.
 
Face au ciel, et cherchant dans les nuages en marche
Des géants abrutis par le froid et la nuit,
Je verrais se creuser des tunnels et des arches
Et des arbres de lueurs porter des lueurs de fruits.
 
Tout au fond d’un cratère écrasant de vertiges
Apparaîtrait l’étoile aux pointes de cristal,
La rose du matin détachée de sa tige,
La belle promeneuse au regard sans rival
 
Robe de velours noir et diadème éclatant
De la boue de comète à la soie du corsage,
Collier brisé laissant tomber tant de diamants
Que l’herbe autour de moi pleure comme un visage
 
Je t’enferme en mes yeux clos sur ta belle image
Aux ténébreux jardins roués par les éclairs
Que ta robe et tes pieds laissent sur leur passage
Quand tu sors de la mer tumultueuse de l’air.
 
Mais je voudrais savoir où tu passas la nuit.
Ainsi que moi, tu dors aux heures de lumière
Indifférente aux cris, aux chants, au jour, aux bruits
Ainsi que moi, tu dors et rêves la dernière.
 
Et je souhaite de dormir sous tes réseaux
De te voir apparaître au-dessus des campagnes
Dans un verger bruyant d’abeilles et d’oiseaux
A l’ombre du plus grand des châteaux en
Espagne
 
Et je me dissoudrais dans un sommeil profond
Comme le café noir et comme la migraine
Ou la sonorité du bronze des bourdons
Et la monotonie du feu et des fontaines.
 
Tandis que toi, pâlie à l’écume du jour,
Disparaîtrais du ciel comme un reste de poudre
Sur un visage en proie aux charmes de l’amour
Qui flambe et monte avec le fracas de la foudre.
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