Il penseroso (1858)
#ÉcrivainsFrançais
Il est, bien loin de l’Italie, Un lieu cher à mon souvenir ; C’est là qu’a commencé ma vie Et c’est là que je veux mourir. Petit sur la carte du monde,
Dans notre humaine comédie Viens donc jouer ton rôle, ami. On n’est en règle qu’à demi Quand soi-même on se congédie : Que l’on soit vainqueur ou vaincu,
Heureux qui sans effort admire ! Cœur humble à la fois et joyeux, Soupirant sans être envieux, Il est joyeux quoiqu’il soupire ; Divin plaisir que d’admirer,
Au temps des senteurs Et de l’alouette, Fille joliette, Aux vives couleurs, En fraîche toilette,
« Détends l’arc, » t’ont dit Ésope Et le grondeur de Sinope ; Si ta tête est en syncope, C’est que l’arc fut trop tendu. Or qui trop fend est fendu,
Du méchant et de sa malice, Des sots, de l’astuce et du vice Faire justice plaît au cœur ; Mais laissons à Dieu cet office : Pour nous il est beaucoup meilleur…
Ainsi, déjà lassées De mon toit familier, Ô mes douces pensées, Vous quittez, insensées. L’asile hospitalier ?
Bon pied, bon œil et bonne dent C’est toute ma fortune ; Des grâces dont chacun veut tant, Je n’ai demandé qu’une : Un cœur joyeux, un cœur sans fiel,
Sans briser l’idole qu’on aime, S’accuser ou se repentir, C’est le moyen de pervertir Notre conscience elle-même : Mal faire en disant Peccavi !
Vierge au pied leste, Au chant mutin, A la main preste, A l’œil lutin, Au front hautain,
Connais-tu ces épis sans grâce, Qui, dans une manche glissés, Par leurs poils revêches hissés, Grimpent d’autant plus qu’on les c… Tels sont, contredisant toujours
Tu sens profondément et le bon et… Et la haine et l’amour, la nature… Et si l’art devant toi les reprodu… Ton âme resplendit comme un soleil… Mais si, clavier muet, tu n’as, jo…
Pour ne rien voir qui nous dérange… Détourner ou fermer les yeux, Ce procédé facétieux Est un remède assez étrange : On y gagne un jour de repos,
—« Petite perle cristalline, Tremblante fille du matin, Au bout de la feuille de thym Que fais-tu là sur la colline ? « Avant la fleur, avant l’oiseau,
Sans le vouloir, sans le voir même… D’un cœur éveillant le poème, On peut, hélas ! faire souffrir, Faire vivre et faire mourir Ce cœur qui dans l’ombre nous aime…