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L’orée du bois

Tu me dis que tu aimes le mot ronce,
Et j’ai là l’occasion de te parler,
Sentant revivre en toi sans que tu le saches
Encore, cette ardeur qui fut toute ma vie.
 
Mais je ne puis rien te répondre : car les mots
Ont ceci de cruel qu’ils se refusent
À ceux qui les respectent et les aiment
Pour ce qu’ils pourraient être, non ce qu’ils sont.
 
Et ne me restent donc que des images,
Soit, presque, des énigmes, qui feraient
Que se détournerait, triste soudain,
Ton regard qui ne sait que l’évidence.
 
C’est comme quand il pleut le matin, vois-tu,
Et qu’on va soulever l’étoffe de l’eau
Pour se risquer plus loin que la couleur
Dans l’inconnu des flaques et des ombres.
 
II
 
Et pourtant, c’est bien l’aube, dans ce pays
Qui m’a bouleversé et que tu aimes.
La maison de ces quelques jours est endormie,
Nous nous sommes glissés dans l’éternel.
 
Et l’eau cachée dans l’herbe est encore noire,
Mais la rosée recommence le ciel.
L’orage de la nuit s’apaise, la nuée
A mis sa main de feu dans la main de cendre.
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