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La branche

Branche que je ramasse à l’orée des bois
Mais pour t’abandonner à la fin du monde,
Cachée parmi des pierres, dans l’abri
Où commence invisible l’autre chemin
(Car tout instant terrestre est un carrefour
Où, quand l’été s’achève, va notre ombre
Vers son autre pays dans les mêmes arbres,
Et rarement est-on venu reprendre
Une autre année la branche dont on courbe
Tout un été, distraitement, les herbes)
Branche, je pense à toi maintenant qu’il neige,
Je te vois resserrée sur le non-sens
Des quelques nœuds du bois, là où l’écorce
S’écaille, au gonflement de tes forces sombres,
Et je reviens, une ombre sur le sol blanc,
Vers ton sommeil qui hante ma mémoire,
Je te prends à ton rêve qui s’éparpille,
N’étant que d’eau pénétrée de lumière.
Puis je vais là où je sais que la terre
Se dérobe d’un coup, parmi les arbres,
Et je te jette aussi loin que je peux,
Je t’écoute qui rebondit de pierre en pierre.
(Non, je te veux
Tout un moment encore.
Je vais, je prends
Le troisième chemin, que je voyais
Se perdre dans les herbes, sans que je sache
Pourquoi je n’entrais pas dans ses fourrés
Certes sombres, certes sans voix d’oiseaux dans les feuillages.
Je vais, je suis bientôt dans une maison
Où j’ai vécu jadis mais dont la voie
S’était perdue comme, quand la vie passe,
Des mots sont dits, sans qu’on s’en aperçoive,
Pour la dernière fois dans l’éternel.
Un feu brûle, dans une de ses salles toujours désertes,
Je l’écoute qui cherche dans le miroir
Des braises le rameau de la lumière,
Ainsi le dieu qui croit qu’il va créer
L’esprit, la vie, dans la nuit dont les nœuds
Sont serrés, infinis, labyrinthiques.
Puis je te pose, doucement, sur le lit des flammes,
Je te vois qui t’embrase dans ton sommeil,
Je suis penché, je tiens longtemps encore
Ta main, qui est l’enfance qui s’achève.)
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