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Le bonheur

               Stances irrégulières.
             À Madame la princesse D’Hatzfeld.
 
 
Le bonheur ici-bas tient à bien peu de chose.
Vous ne l’ignorez pas ; vous savez, d’après vous,
Que le sort au hasard porte souvent ses coups,
             Et que l’aquilon en courroux
             N’épargne pas même la rose.
 
Aussi n’êtes-vous pas de ces cœurs rigoureux
Qui, prompts à condamner ceux que le sort opprime,
   Dans un revers n’ont jamais vu qu’un crime ;
             Compatissante aux malheureux,
Étrangère aux calculs d’une froide prudence,
Aussi vous voyons-nous réparer envers eux
             Les oublis de la Providence.
 
Bien qu’à l’agneau tondu Dieu mesure le vent,
J’aime qu’une bergère ait un cœur secourable.
Dieu ne souffle pas seul, hélas ! et plus souvent
Aux tondeurs qu’aux tondus le vent est favorable.
 
Au vent qui m’a fané reverdit Richelieu.
             Pauvres humains ! point de milieu :
             Oui, dans ce siècle impitoyable,
             Dès qu’on vous recommande à Dieu,
             C’est qu’on vous abandonne au diable.
 
Le doigt divin pourtant se révèle à moitié
Dans les maux dont il frappe une âme peu commune.
Didon devint meilleure au sein de l’infortune ;
En éprouvant la peine elle apprit la pitié.
             L’or s’épure ainsi dans la flamme.
Comme elle, belle et bonne, ah ! qu’il vous sied, madame,
D’apprendre à cette école autant qu’elle en apprit.
             C’est le propre d’un bon esprit,
             Tout autant que d’une belle âme.

Poésies mêlées (1826)

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