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La veillée du nègre

Le soleil de la nuit éclaire la montagne ;
Sur le sable désert faut-il encore rester ?
Doucement dans mes bras laisse-moi t’emporter ;
Bon maître, éveille-toi ! marchons vers la campagne.
   Tes yeux sont clos depuis trois jours :
   Maître ! dormiras-tu toujours ?
 
L’orage dans son vol a brisé les platanes ;
Le navire sans voile a disparu dans l’eau :
De ton front tout sanglant, j’ai lavé le bandeau ;
Marchons, les pauvres noirs t’ouvriront leurs cabanes.
   Tes yeux sont clos depuis trois jours :
   Maître ! dormiras-tu toujours ?
 
Je voudrais deviner ton rêve que j’ignore.
Oh ! que ce rêve est long ! finira-t-il demain ?
Demain, en t’éveillant, presseras-tu ma main ?
Oui, je t’appellerai quand j’aurai vu l’aurore.
   Tes yeux sont clos depuis trois jours :
   Maître ! dormiras-tu toujours ?
 
Mais la lueur du jour s’étend sur le rivage,
Le flot porte sans bruit la barque du pêcheur ;
Viens !... que ton front est froid ! quelle triste blancheur !
Oh ! maître ! que ta voix me rendrait de courage !
   Tes yeux sont clos depuis trois jours :
   Maître ! dormiras-tu toujours ?

Romances (1830)

#ÉcrivainsFrançais

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