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La voix encore

Et venais-tu pour la nuque ployée
Là-haut, dans cette chambre, non, dans le ciel
D’orage, et cette main dans la tienne, et le cri
D’espoir, de joie, puis relever les yeux
Vers la cime parfaite des montagnes
 
Et contempler, comme nuptialement,
La beauté, qui semble augurale, de ce monde
(Car c’est là, sous l’étoile, que je demeure,
 
Ma parole est ce givre sous ce silence,
Le seuil est là, où la grappe des pierres
Mûrit hors de l’espace, illuminée),
Je t’ai permis de boire à cette lumière,
Je t’ai donné l’enfant qui me désigne.
Par la brièveté de la porte, vois
Le pain brûler sur la table.
 
Par le bois cloué mort dans la porte, prends
Mesure de la nuit qui couvre la terre.
Par le déchirement de la couleur,
Par le gémissement des gonds de la porte, sens
 
Se déjointer dans l’énigme du temps
L’être de la présence et de la promesse.
La nuit est prompte et lourde à retomber
 
Sur le bleu du dehors du monde, dont la voix
Va te sembler trompeuse, te faire mal,
Et le cri de la nuit est acre dans l’huile
 
Des gonds de toute chose : cependant,
Le poids même du fer sur la pierre témoigne
De corps suants, courbés
Sur le bâtir mystérieux et le sens.
 
Et vois, la pierre
A des mots infinis dans l’herbe du seuil,
Et là, dans la chaleur,
Ce qui n’a pas de paix est la paix encore. »
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