I
L’oiseau qui s’est dépris d’être
Phénix
Demeure seul dans l’arbre pour mourir.
Il s’est enveloppé de la nuit de blessure,
II ne sent pas l’épée qui pénètre son cceur.
Comme l’huile a vieilli et noirci dans les lampes.
Comme tant de chemins que nous étions, perdus,
Il fait un lent retour à la matière d’arbre.
Il sera bien un jour.
Il saura bien un jour être la bête morte,
L’absence au col tranché que dévore le sang.
Il tombera dans l’herbe, ayant trouvé
Dans l’herbe le profond de toute vérité.
Le goût du sang battra de vagues son rivage.
II
L’oiseau se défera par misère profonde.
Qu’était-il que la voix qui ne veut pas mentir,
Il sera par orgueil et native tendance
A n’être que néant, le chant des morts.
Il vieillira.
Pays aux formes nues et dures
Sera l’autre versant de cette voix.
Ainsi noircit au vent des sables de l’usure
La barque retirée où le flot ne va pas.
Il se taira.
La mort est moins grave.
Il fera
Dans l’inutilité d’être les quelques pas
De l’ombre dont le fer a déchiré les ailes.
Il saura bien mourir dans la grave lumière
El ce sera parler au nom d’une lumière
Plus heureuse, établie dans l’autre monde obscur
III
Le sable est au début comme il sera
L’horrible fin sous la poussée de ce vent froid.
Où est le bout, dis-tu, de tant d’étoiles,
Pourquoi avançons-nous dans ce lieu froid ?
Et pourquoi disons-nous d’aussi vaines paroles,
Allant et comme si la nuit n’existait pas ?
Mieux vaut marcher plus près de la ligne d’écume
Et nous aventurer au seuil d’un autre froid.
Nous venions de toujours.
De hâtives lumières
Portaient au loin pour nous la majesté du froid—
Peu à peu grandissait la côte longtemps vue
Et dite par des mots que nous ne savions pas.