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Andromède en proie au monstre

Quel sera, monstre, mon supplice ?
Déjà, dérisoire, ton nom
Devient mot d’amour et complice
De ma honte et de notre union.
J’adopterai, d’abord, la pose
Propice à ma métamorphose.
En t’épousant, que je m’endorme,
Par volupté, je prends ta forme.
 
Car, au-delà de la nausée,
Je découvre, en moi, des domaines
Qui sont la dot à l’épousée :
J’y trouverai la clef des chaînes
Et l’endroit de ta sépulture
Quand, monstre, il te faudra mourir
A la fin de notre luxure,
De la mort de notre désir.
 
Car tout est nôtre, désormais,
Je suis ton monstre et ta réplique,
Je suis la porte du palais,
Je suis l’image symétrique
Qui surgit, lorsque tu parais,
Je suis ta rivale lubrique
Et mon désir se faisait fuite
Pour sentir ton souffle à ma suite.
 
Le monstre dit : «
Pas tant d’histoires,
Pas tant de cris et de paroles.
Je suis le maître et mon vouloir
Ne s’embarrasse ni d’un viol,
Ni d’accordailles, ni de noces.
Ta voix me brise le tympan.
Je vais mon train, selon l’élan
Qui m’entraîne et me rend féroce. »
 
Andromède, étant tout enfant,
Chérissait un parc solitaire
Où, chaque soir, un éléphant
Se promenait en grand mystère.
Un éléphant ?
Est-ce bien vrai ?
Ce n’est, peut-être, qu’un vieux rêve,
Mais elle y pense et jurerait
Qu’il la piétine et la soulève.
 
Andromède étant tout enfant...
Andromède que fait la bête ?
Andromède qui te défend ?
Quelle tempête, dans ta tête,
Au réel mélange un vieux rêve ?
Mais la chanson que tu répètes
Nul ne sait comme elle s’achève.
Andromède étant tout enfant...
 
Le monstre dit «
Je suis la bête
Mais, dans le ciel, tout comme toi,
Enrichi d’étoiles en fête,
J’aurai ma place et mon emploi. »
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