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Sirène

Il n’était pas une fois
un beau château au centre d’un désert
nul ne tentait d’en franchir l’accès
dans un bassin
y nageait une sirène
Il n’était pas une fois
ou plutôt si
II était il était une fois
Il est encore au centre du désert
derrière les hauts murs
une sirène nageant dans un bassin
Solitude silence eau sans clapotis
Rien ne viendra-t-il troubler la nage régulière de la sirène
C’est elle immuable qui nécessite
Le mouvement des aiguilles sur les cadrans
C’est elle qui règne sur la respiration
Sur celle des amants et celle des dormeurs
Sur celle de celui qui rêve
Sur celle de celui qui aime
Sur celle de l’amante éperdue
Voici que l’orage se lève dans son uniforme d’encaisseur
Enjambe l’horizon
Se brise aux monts
Et dans la splendeur de l’arc-en-ciel
Se dérobe en un fleuve odorant
Se brise aux piles du prisme des couleurs
Sur la campagne agenouillée
Dans ce fleuve au bon parfum
Voici que nage la sirène
Immense dans le ciel à marée haute
Elle passe au-dessus des champs au-dessus des villes
L’éclat de ses écailles est celui de l’éclair
Sa queue d’un mouvement lent balaie les nuages
Le paysage retourne au soleil
La sirène à son palais lointain
Tout cela peut se voir
Quand l’orage gronde
Quand il s’enfuit sous l’arc-en-ciel
Mais il est d’autres orages
Il est des paysages du cœur
Il est d’autres sirènes.
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